La journée du livre de Teyssieu

En ce dimanche matin de Pâques encore ensommeillé (nous avons changé d'heure dans la nuit), je roule à travers la basse Corrèze en direction du Lot. Le soleil encore bien hésitant semble éprouver des difficultés à se lever. Il oscille entre apparitions fracassantes et passages discrets derrière les nuages. J'ai traversé Sainte-Fortunade, Beaulieu sur Dordogne, Altillac puis Biars et Bretenoux. Les villages sont encore endormis, je n'ai vu presque personne dans les rues. C'est vrai que nous avons avancé nos pendules montres et autres horloges d'une heure. La veille, J'ai vaguement préparé l'itinéraire, je l'ai mémorisé. Comme je n'ai pas pris de note je compte sur un panneau indicateur à la sortie de Bretenoux, sans quoi je serai bien en peine de trouver ma route. Devant moi la citadelle toujours impressionnante de Castelnau dresse son ombre séculaire sur les hauteurs. Ouf, à la sortie de Bretenoux, à un petit rond-point je pose mon regard sur le panneau tant espéré « Teyssieu 10 km ». Je suis presque arrivé. Déjà sur les kilomètres précédents j'ai aperçu quelques affiches annonçant la journée du livre dans ce village, la publicité a donc été assurée, c'est plutôt rassurant.

J'entame une longue montée sur une route bucolique qui serpente sur une grosse colline. Bordée de bois métissés de châtaigniers et de bouleaux, elle se tortille et se démène pour épouser le relief accidenté de l'endroit. Au début de l'ascension un panneau souhaite aux visiteurs la bienvenue sur la route des noix. L'approche du fameux village est égrenée par des lieux dit et hameaux aux noms poétiques et imaginatifs comme seules nos campagnes peuvent en inventer : planavergne, la vitarelle, sut-long, pech de clédy et cabre, ou encore camp dessous.

Enfin me voilà arrivé, le village est charmant, il arbore une magnifique tour médiévale plantée au centre du bourg qui joue les phares bretons. Un chapiteau blanc a été dressé à côté, une large banderole annonce l'évènement de la journée et je constate que pas mal de personnes jalonnent la petite place qui précède la structure. On s'affaire un peu partout, à l'entrée on accueille les auteurs, ici on achève de placer des chaises, là, dans un délicieux parfum on prépare des crêpes et à deux pas, au pied de la tour magistrale, dans l'ancienne école on fait couler du café. Il est bienvenu car il réchauffera les mains des auteurs pour qu'elles puissent signer les ouvrages sans trembler. La fraîcheur baigne le village, mais le soleil qui nous offre quelques rayons apparaît comme une promesse de meilleur.

Évelyne Chantelot l'organisatrice m'accueille et m'indique mon emplacement. Elle me donne mon ticket pour le repas qui se prendra au restaurant situé cinquante mètres en face, de l'autre côté de la place. La plupart des 37 auteurs sont arrivés, certains sont prêts à dédicacer et attendent de pied ferme les visiteurs tandis que d'autres, heureux et souriants saluent des amis et connaissances qu'ils ont l'habitude de croiser sur les salons. Immédiatement mon regard se pose sur mon ami Roger Martini dont j'ignorais la présence aujourd'hui. Je remarque aussi une ou deux têtes connues. Après avoir salué Roger et avoir pris de ses nouvelles, je décide d'aller goûter le café local. Une bonne journée commence toujours par un café, son odeur plante le décor et l'ambiance feutrée incite à la discussion. L'organisation a même prévu les gâteaux pour accompagner le breuvage chaud, gâteaux au chocolat ou encore aux noix (je me souviens alors du panneau qui annonçait la route des noix). Tout cela est de très bonne augure, l'accueil excellent mérite d'être souligné. Mon camarade de gauche est un auteur toulousain de polars et autres romans noirs. Il répond au nom de Jean-Marie Dumarquez. Facile de contact il se dévoile sans se faire prier. Agent immobilier de métier il s'est lancé dans l'écriture en 2004 sur les conseils de sa femme. Je me dis que souvent, derrière chaque homme qui écrit se trouve une femme.

Les deux ouvrages qu'il présente « City blues » et « Les seigneurs d'Amaury » ont belle allure. Les couvertures soignées mettent en confiance et les résumés au dos sont efficaces. Je pense à ma femme et je me dis qu'elle sera ravie de découvrir un nouvel auteur de ce genre qu'elle affectionne tant. A cause de notre discussion incessante nous ne voyons pas arriver l'heure du repas et nous partons nous sustenter presque en retard. Le restaurant, atypique est agréable. L'intérieur surprend car toute la décoration est basée sur le thème de la Bretagne. Nous sommes nombreux à nous dire que le patron doit être breton. Renseignement pris auprès de l'intéressé j'apprends que cette décoration est due à une soirée à thématique bretonne. A chaque soirée un nouveau sujet. Après l'assiette de charcuterie servie avec des noix nous enchaînons avec des cuisses de volaille confites accompagnées de pommes de terres sautées. Je me réjouis qu'elles aient surtout sauté dans mon écuelle ! La discussion s'est engagée très vite et je découvre que les personnes présentes à table sont de Saint-Flour dans le Cantal. Etant donné que je connais un peu le coin (coucou Caro, Hervé, Flavie et Quentin ! ) le contact n'en est que plus facile. Déjà le fromage arrive, passe et trépasse. Si les auteurs ont une bonne plume ils possèdent pour la plupart un solide coup de fourchette. L'excellente part de tarte glisse avec le café et nous revoilà partis pour l'aventure des rencontres. Je crois d'ailleurs que toutes ces manifestations autour du livre devraient s'appeler « Rencontres autour du livre » ou « Rencontres avec les auteurs » car avant de vendre et signer des ouvrages c'est d'abord le premier intérêt de ce genre de rassemblements. De ce point de vue la mission est une réussite. J'ai parlé avec beaucoup de monde, des gens issus du village et qui l'ont quitté pour travailler mais qui ont conservé une maison de famille, havre de paix et de quiétude, coffre immense contenant les souvenirs d'enfance, les plus précieux. Après quelques échanges désopilants avec l'excellent Louis-Olivier Vitté auteur et journaliste à l'humour imprévisible que l'on ne présente plus, je retourne à ma place pour continuer à signer. Parmi mes « clientes » lectrices j'adresse un clin d'œil à Amandine de Cahors, qui m'a aussi plusieurs fois servi le café. Grâce à Laure et Liliane j'ai pour la première fois dans ma jeune carrière d'auteur, eu à faire à deux lectrices qui n'ont pas souhaité de dédicace sur leurs livres. Laure détentrice d'un charme indéfinissable et d'une paire d'yeux bleus délavés sublimes (je vous promets qu'il ne s'est rien passé à part le plaisir bref de la rencontre). Je n'oublie pas la sympathique famille Guérin, avide de livres, avec laquelle j'ai eu un très agréable contact. J'espère qu'ils passeront me rendre visite sur ce blog un de ces jours.

La décidément très active Amandine passe dans l'après-midi avec une copine pour vendre des tickets de tombola. Pour la modique somme de cinq euros j'acquiers trois tickets, les numéros 31, 32 et 33. Je montre le 31 à Jean-Marie Dumarquez habitant de Toulouse en lui disant que ce numéro est sûrement gagnant ! Il demande aux jeunes filles s'il peut choir son numéro, j'argue alors que je désire avoir avoir le 19 évidemment. Mais le choix n'est pas possible. Plus tard, nous apprendrons défaits, que le sort ne nous a pas désignés ...Mais l'excellente journée passée à Teyssieu nous aura vite fait oublier cette péripétie. Très bien organisée, cette journée bénéficie d'une équipe de bénévoles efficaces, nous avons été choyés, bichonnés. Les visiteurs au rendez-vous furent nombreux et très sociables. Une expérience à rééditer l'année prochaine.

Après avoir échangé nos ouvrages, Jean-marie et moi nous séparons en nous promettant de nous visiter mutuellement nos blogs.

J'emprunte à nouveau la route des noix, les virages tortueux, les châtaigniers ombrageux, cabre, sut-long, planavergne.

Tout en bas, le château de Castelnau toujours de garde, me laisse m'éloigner le cœur léger d'une magnifique journée passée à Teyssieu.