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pèle mèle

Goliath, un film de Frédéric Tellier

Publié le 22/03/2022 à 10:18 par sebastienvidal Tags : image sur vie moi monde coup homme travail société air film
Goliath, un film de Frédéric Tellier

Goliath

 

 

Un film de Frédéric Tellier, avec Emmanuelle Bercot, Gilles Lellouche, Pierre Niney, Marie Gillain, Laurent Stocker (de la Comédie Française), Jacques Perrin.

 

« Dis-moi, qu’entends-tu faire de ton unique, sauvage et précieuse vie ? »

(Vers tiré d’un poème de Mary Oliver qui figure à la fin du film.)

 

Goliath est un film de trajectoires. Quatre, pour être précis. Quatre personnes, quatre vies qui vont se télescoper, avec plus ou moins de violence, d’incertitudes.

Ce film n’est en rien manichéen. Il aurait été facile de ranger les gentils du côté des victimes et les méchants du côté des lobbystes. Evidemment, c’est naturel d’éprouver de l’empathie pour les victimes, pour les gens qui se battent pour une cause qui nous semble juste, et c’est bien normal d’entrer en détestation pour ceux qui agissent dans leur seul intérêt et seulement pour de l’argent. Bien sûr qu’il y a ça dans ce film, mais pas seulement. Les personnages sont complexes, ils montrent parfaitement que personne n’est noir ou blanc, on est parfois dans des nuances de gris et d’autres fois, un coup noir et un coup blanc.

De quoi parle le film ? Un avocat spécialisé dans la lutte contre les pesticides, (Gilles Lellouche), défend une agricultrice dont la compagne est morte d’un cancer qui aurait été provoqué par un produit phytosanitaire (ce terme est quand même beaucoup plus rassurant que « pesticide », les mots jouent un rôle dans la lutte). Cet avocat est confronté à une hydre très puissante, la société qui fabrique le produit incriminé, et les moyens mis en œuvre par les deux parties sont très inégaux. D’un côté un homme avec des moyens très limités, de l’autre, une multinationale qui peut engager des dizaines de millions d’euros et des dizaines de personnes dans le combat. D’où le titre, Goliath. Bien sûr que ça va vous rappeler de vraies affaires. C’est le but. En parallèle, nous suivons un autre personnage joué par Emmanuelle Bercot, dont le mari souffre d’un cancer. Elle est persuadée que la maladie est provoquée par les pesticides répandus par un agriculteur dont les terres jouxtent leur habitation.

 

Enfin, il y a un homme, un lobbyste, incarné par Pierre Niney, qui défend coûte que coûte les intérêts du fabricant de pesticides avec la coopération d’un personnage joué par Laurent Stocker. Pierre Niney est fabuleux en jeune qui monte, en star du lobbying. Il est tellement bon qu’en sortant de la salle, si je l’avais croisé, j’aurais eu besoin d’un petit moment pour séparer l’homme du personnage.

 

Ce film est brillant, il n’a pas peur de prendre le temps de développer son propos, de planter le décor en alternant au début, la narration sur les quatre plans principaux du scénario. Nous entrons ainsi dans l’histoire par plusieurs portes sans toutefois nous perdre.

La force de ce long métrage c’est la distribution, aux petits oignons. Tout le monde est bon, sans exception. Ce film s’enfonce profondément dans le tissu social de notre pays et en exhibe les lambeaux. Sans divulgâcher, il refuse aussi l’habituelle fin très heureuse typiquement américaine, pour autant, cela ne veut pas dire que les méchants gagnent à la fin ou que les gentils perdent.

 

Frédéric Tellier prend le parti de montrer la réalité des choses, comment fonctionne le système, même si ça fait mal au bide. Sur l’histoire, on va forcément penser à l’excellent Dark Water, ou même Erin Brokovitch, sauf que là, avec Goliath, on est dans une teinte bien plus sombre, on balaye tout le spectre du champ de bataille.

La grande force du film, c’est de disséquer les mécanismes des entreprises agrochimiques, leurs méthodes de communication, les moyens employés pour continuer à répandre et vendre leur poison, parce que c’est quand même de ça qu’il s’agit, de produits qui tuent. On entend les fameux « éléments de langage » répétés à l’envi par les communicants payés grassement, on regarde, révulsé, les compromissions, les renoncements, la corruption et le soudoiement, les ententes d’arrière-cuisine, les promesses de renvoi d’ascenseur, les méthodes pour manipuler les assemblées.

 

Ce qui est vraiment fort, c’est la mise à nu de ce langage efficace, cette novlangue, qui use de l’euphémisme pour faire accepter l’inacceptable, ou qui n’hésite pas à exprimer des contre-vérités pour se faire entendre. Et si ça ne suffit pas, on pose les costumes et les cravates respectables, et on use de la force, de l’intimidation, de la menace. Tellier montre à quel point et comment les ministères sont noyautés par les lobbystes, qu’on nomme plus proprement « conseiller » ou « porte-parole » des groupes industriels. Vous vous souvenez, l’importance du langage. À l’heure de Mc Kinsey, ça résonne. Le réalisateur a méchamment enquêté, il est documenté. Ça tient férocement la route. Ça sonne juste parce que c’est juste.  

Au milieu, il y a la souffrance des victimes, et celle des proches des victimes. Qu’on entend si peu, dont la voix est parasitée par la guerre de com sur les réseaux, où les plus riches maîtrisent l’audience à coup de trolls et de robots qui font bien leur travail.

 

Il y a peu, j’ai vu le film Un autre monde, le dernier Stéphane Brizé, avec Vincent Lindon, Sandrine Kimberlain et Marie Drucker. Un grand film. J’y ai vu un lien, parce que les deux abordent la souffrance des rouages, de ces gens qui se vendent pour un gros salaire, même s’il faut pour cela défendre l’indéfendable. La saloperie finit par avoir un coût moral, même si ça ne se voit pas.

Il y a tellement de scènes qui disent des choses justes, subtiles, j’en suis contrarié car en parler serait divulguer et je m’y refuse. Je veux que vous preniez le bus en pleine face, sans air-bag. Je veux juste dire qu’il y a des moments où l’on voit une image du bonheur, mais pas le bonheur.

 

Ce film, c’est celui de la réalité de notre monde, pas joli joli ; ce film, c’est le parti pris de vous inviter à choisir entre un mensonge qui rassure et une vérité qui dérange. Le confort ou l’inconfort. La somnolence ou le réveil.