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merci pour ton superbe commentaire sur cette chanson des plus marquantes de dire straits. comme toi, sans comp
Par Anonyme, le 01.10.2025
l’interprét ation de joan baez arrive encore à magnifier cette magnifique chanson
Par Anonyme, le 18.06.2025
merci pour cette analyse tellement juste de notre génie poète.
ce fût un plaisir de vous lire
Par Anonyme, le 06.06.2025
merci pour cette traduction.
j'écoute très souvent cette chanson riche de ce message qui exprime la bêtise h
Par Anonyme, le 24.05.2025
je pense et même je le souhaite au plus profond de moi, qu'un jour une école de france pays initiateur des dro
Par Anonyme, le 02.10.2024
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Date de création : 08.07.2011
Dernière mise à jour :
11.10.2025
442 articles
Perdu en dédicace
Dédicacer en librairie, maison de la presse, médiathèque est une aventure risquée quand on n'est pas connu. Il faut une bonne dose d'inconscience, parfois de bravoure et aussi d'audace pour risquer la salle vide, l'écho des absents.
L'audace de prétendre attirer des gens qui ne vous connaissent pas, qui n'ont peut-être (probablement) jamais entendu parler de vous; les attirer par la seule grâce d'une affiche placardée de travers sur la devanture du magasin (entre l'annonce de la fête du boudin et le prochain don du sang, n'y voyez aucun rapport) et d'un entrefilet dans le canard local coincé entre la rubrique nécrologique et les petites annonces. Il faut bien cela car si on compte uniquement sur le charisme de l'auteur, la plus grande prudence s'impose.
L'accueil du patron ou de la patronne (parfois les deux) est très souvent chaleureux, c'est après que ça se gâte. A peine installé derrière les piles de livres (on est toujours surpris par l'optimisme des libraires) le maître des lieux vous demande si vous désirez un café, un thé ou tout autre boisson qui vous ferait plaisir. Par précaution, nous éviterons les liquides alcoolisés qui auraient tendance à brouiller nos signatures (n'est pas Buchowski qui veut) et, même si elles peuvent fortement détendre l'atmosphère et générer une ambiance sud-américaine de carnaval, elles possèdent surtout le pouvoir de transformer les espoirs d'Austerlitz en Waterloo littéraire.
Une fois assis je disais donc, le plus dur reste à faire. Le postérieur vissé avec sérénité sur un fauteuil (plutôt rare), une chaise rembourrée (courant) ou une chaise en bois simple (parfois), nous entrons dans la peau du guetteur assis, à ne pas confondre avec le tireur couché cher à Saint Jean-Patrick Manchette. Les auteurs étant souvent dotés d'un sens de l'observation assez aiguisé, ils sont les mieux placés pour, du fond sombre du magasin où on les a remisés, voir arriver les clients de l'établissement. Ce flot régulier de gens qui entrent et sortent, transforme s'il n'y prend garde, l’auteur en vache passive regardant passer les trains de clients. L'œil morne, juste éclairé par les néons du plafond, le sourcil abattu et les pouces au bord de la crampe à force de tourner, disons-le clairement : l'auteur s'emmerde. Il parvient, grâce à un entraînement hebdomadaire rigoureux, un clonage avec le caméléon et une souplesse oculaire immanente, à poser un œil sur l'entrée du magasin et l'autre sur la pendule qui traîne sa misère avec une lenteur toute lémurienne.
Grâce à son grand sens de l'observation et à une science du commerce assimilée de manière empirique, l'auteur sait tout de suite à quoi s'attendre dès l'arrivée d'un client ou d'une cliente. Il y a celui dont il n'a rien à espérer qui pénètre d'un pas décidé dans le magasin et file tête baissée vers un endroit précis où il sait qu'il trouvera son graal. Là, l'auteur est totalement invisible. Il pourrait aussi bien danser le sirtakis avec une plume dans le cul que ça ne changerait rien.
Il y a aussi celui ou celle qui entre et, par crainte que vous l'accrochiez avec un slogan façonné avec un grand talent (vous aimez les romans ?) se concentre sur le dernier ouvrage d'un auteur qu'il ne connaît pas mais qui a le grand avantage de ne pas être dans le magasin. Celui-ci redouble d'efforts pour nier votre présence et pose son regard partout sauf là où vous vous trouvez. Ce client-là, saisi par la peur viscérale d'être obligé de débourser de la monnaie sonnante et trébuchante, reste en apnée le temps de procéder à son achat (le plus souvent le canard local ou le programme télé) et de prendre la fuite comme si les quatre cavaliers de l'apocalypse le poursuivaient.
Il existe aussi l'habitué, celui qui semble se déplacer sur des rails et se retrouve tel un automate à la caisse, pour régler ses cartes postales, ses stylos ou son loto. Il n'y a rien à attendre de celui-là non plus. Enfermé dans son monde, il vous adressera au mieux un petit sourire poli en coin qui aura pour mission de vous dire à la fois "bonjour" et "au revoir".
Parfois, vagabondant dans les rayons en quête d'une lecture quelconque pour tuer le temps (achète un livre bon sang !) un individu déambulera un temps infini d'une gondole à l'autre au point qu'on se croira à Venise), feuilletant d'un geste nonchalant un magazine, puis un suivant, poussant de temps à autre un long soupir d'ennui et vous jetant à intervalles réguliers des regards condescendants qui disent " Pauvre gars, toute la matinée assis derrière sa table à regarder voler les mouches, si c'est pas triste ! je ne voudrais pas être à ta place". Il semble ignorer qu'il se trouve dans la même situation, sauf que lui est debout. Durant toute la période où ce potentiel client sera présent, l'auteur, toujours prêt à ranimer son fol espoir de vente, serrera les fesses, non pour contenir un pet, mais en croyant que l'individu finira par nouer le contact.
Au fond du magasin, dans l'ombre, il y a l'amateur de bouquins de cul qui est contrarié par votre présence. Quand il est entré il vous a vu et a compris illico qu'il ne serait pas seul. Il est là, errant dans le fond de la pièce, regardant sans en avoir l'air avec concupiscence les magazines rangés tout en haut et exhibant fesses et nichons retouchés. Il est embêté, il vous déteste, vous qui le suivez du regard et l'empêchez de se saisir avec discrétion du dernier numéro de "Chattes en chaleur, numéro spécial été".
Et puis il y a le flâneur, ah le flâneur, que l'auteur l'aime celui-là ! Parce qu'avec le flâneur tout est possible. Il entre, le regard touristique mais intéressé. On dirait qu'il découvre une merveille architecturale à chaque pas, le ravi de la crèche. Il n'en revient pas de tomber sur un véritable auteur en dédicace dans ce coin perdu ou les corbeaux volent sur le dos. Il est en général facile d'accès et ne rechigne pas à poursuivre une conversation voire à l'initier. Le flâneur est plutôt du genre curieux, il fouine, renifle, teste. Il est ouvert à tout et peut vous surprendre n'importe quand. Il va vous écouter lui faire l'article tout en tripotant le livre, en l'ouvrant, le feuilletant et en parcourant la 4ème de couverture. Il vous jettera de temps en temps des petits coups d'œil pour vous rassurer sur le fait qu'il vous écoute, il prendra son temps. Durant cette rencontre, un ou deux autres bulldozers seront passés sans un regard pour acheter des clopes, un jeu à gratter ou l'Equipe pour savoir si enfin, Benzema a chanté la Marseillaise. Puis, au bout d'un suspense intenable, le flâneur achètera votre livre, vous vous appliquerez afin de lui faire une dédicace bien sentie et personnelle, soulagé d'avoir débloqué votre compteur et heureux de faire un heureux.
Parfois c'est là que la magie opère. Un client qui entre vous repère en train de signer un exemplaire pour une personne plantée devant votre table. Il se dit alors que puisque vous avez un client c'est que votre livre doit être bien, sinon personne ne l'achèterait. (oui, la capacité d'analyse des gens est toujours surprenante, et si on n'est pas bien préparé, on peut faire un malaise). Alors le client va attraper votre roman et le regarder d'un air détaché, comme pour ne pas vous donner trop d'espoir. Puis, une fois seul avec vous, un peu honteux, il vous le prendra en murmurant "c'est pour Marie" ou Juliette ou Robert ou Jean-Paul. Alors vous commencez à tisser un lien, histoire que cette rencontre ne soit pas trop brève, qu'il en reste quelque chose, un souvenir, un détail qui fera son chemin dans votre mémoire et celle du client. Souvent les gens s'ouvrent aux auteurs avec beaucoup plus d'impudeur qu'avec des proches. Ils vous confient des choses intimes, des angoisses, comme si vous étiez tenu au secret professionnel (ne confiez jamais un secret à un romancier car vous le retrouverez dans un futur roman). Une relation de confiance s'installe, alors que trois minutes avant nous ne nous connaissions pas. Plus que la signature ce sont ces instants-là qui comptent et que nous chérissons. Ces moments d'humanité qui jalonnent d'interminables minutes d'attente, d'observation, de réflexion et d'introspection, de curage de nez.
Le "méfiant" se présente. L'air suspicieux d'un inspecteur des impôts. Il tâte l'ouvrage, la bouche pincée et les lèvres réduites à un trait blanc. Le "méfiant" est souvent "une méfiante", bien mise, permanentée et il semblerait qu'elle soit tombée dans un tonneau de parfum. Evidemment, elle ne vous connaît pas. Elle se tient hiératique pour ne pas encourager l'auteur derrière sa table à se lancer dans des familiarités du genre "bonjour madame" ou "souhaitez-vous que je vous parle de mon roman ?". Ne parvenant pas à se faire à l'idée que c'est vous qui êtes responsable dudit livre, elle finit par demander "vous êtes l'auteur ?" et vous devez faire un gros effort pour ne pas répondre "non, c'est mon chat, mais le malheureux est souffrant alors je le remplace, une inflammation des coussinets à force de dédicacer, c'est très douloureux". Souhaitant ne pas engager de dépenses pour rien, elle demandera ensuite, l'air de rien, en sondant votre regard pour débusquer un éventuel mensonge "êtes-vous passé à La grande librairie sur France 5 ?". Le coup de grâce asséné derrière les étiquettes.
Bien sûr, arrivent aussi les gens qui savent que vous êtes en dédicace car ils ont épluché le journal et ont lu l'encart publicitaire qui vous annonçait. Ils ont lu votre précédent ouvrage, l'ont aimé, et viennent pour acquérir le nouveau avec l'espoir de ressentir encore une fois ce plaisir des mots, cette surprise d'une formule au détour d'une page, cette ambiance unique qui colle aux basques de chaque auteur.
Il a suffi de quelques personnes agglutinées devant votre table ou le niveau des livres baissent un peu plus vite que les impôts pour que la pendule échappe à votre vigilance et siffle bientôt la fin de la récré. Le tourbillon fut bref mais régénérant. Une bouffée d'air frais remplie de rires, de sourires et de questions rituelles, et de bâillements.
Fichée derrière sa caisse, le patron ou la patronne affiche un sourire satisfait, satisfait d'avoir généré un peu d'activité dans le coin, d'avoir eu un peu plus d'ambiance que d'habitude, d'avoir vendu quelques livres qu'il n'aurait pas vendus en votre absence, et peut-être, d'avoir brandi la Culture à bout de bras.
Les bouchons des stylos se referment, la chemise cartonnée chante sous les élastiques qui claquent, la chaise racle le sol, quelques mots avec le patron, une poignée de mains tandis qu'un retardataire vient chercher un carnet de timbres. Voilà, c'est terminé, jusqu'à la prochaine fois, une prochaine fois pleine d'inconnu.
Bel humour réaliste. Je n'ai jamais tenté cette expérience. Mais mon ego avait été flatté, je l'avoue,lors de la vente(quasi "captive") de mon roman dans mon entreprise(37 d'un coup !)http://aufildejb.centerblog.net
Enorme ! Mort de rire. C'est tout à fait ce que me décrivait Anthony prisonnier du salon du cochon à Bousille-les-oies. :-)Superbement bien décrit pour nous les non auteursEcrire un commentaire